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Chihuahua suscite un débat constitutionnel en Nouvelle-Zélande

Le nouveau député du Parti Vert Ricardo Menéndez March a tweeté le même de ce chihuahua avec un commentaire sur le serment ou l’allégeance de la Nouvelle-Zélande, déclenchant une conversation sur la transformation constitutionnelle, qui allait au-delà que le républicanisme.

Photo : Twitter

Le mème d’un nouveau député vert fut rencontré avec de vitriol de la part de monarchistes fidèles. Laura Walters explique pourquoi il s’agissait d’une conversation beaucoup plus large que la monarchie contre la république.

Lorsque le député vert Ricardo Menéndez March a posté sur Twitter un mème sur le serment d’allégeance de la nouvelle Zélande –un serment qu’il devait prêter en tant que nouveau Membre du Parlement- il n’a pas pensé que cela allait devenir controversé.

Menéndez March a déclaré que son mème chihuahua était simplement une observation sur le fait que la Nouvelle-Zélande continuait à utiliser un serment qui prêtait allégeance à la reine, sans reconnaissance ni inclusion de Te Tiriti o Waitangi.

“Mon visage quand ils me montrent une affirmation d’allégeance à la reine” a-t-il posté.

Le tweet du député a reçu un certain soutien, y compris de la part du futur député vert Teanau Tuiono et de la co-dirigeante du parti maori Debbi Ngarewa-Packer, mais la réaction a été intense.

Menéndez March est un migrant –originaire du Mexique. Certains de ceux qui avaient un problème avec son tweet ont eu recours à des attaques racistes, xénophobes et homophobes.

“C’est la NZ. C’est ce que nous faisons ici, si vous n’acceptez pas nos valeurs, c’est votre problème pas le nôtre” a répondu l’un d’eux.

“Retourne chez toi, ça marche pour nous”, a commenté un autre.

Menéndez March a déclaré que la réponse à son tweet était basée sur l’hypothèse qu’il est républicain, mais il y a un débat beaucoup plus nuancé qui doit être tenu autour de la transformation constitutionnelle.

Photo : Lynn Grieveson

L’idée selon laquelle la Nouvelle-Zélande devrait mettre à jour ses systèmes politiques pour refléter la société actuelle n’est pas récente. Et l’idée de retirer la reine du serment (et de l’affirmation) d’allégeance qui doit lui être prêtée par les députés et par les nouveaux citoyens, a été contestée par le passé.

Phil Goff a pris des mesures pour retirer la reine du serment en 2004, alors qu’il était ministre de la justice.

En 2010, l’Australie a changé ses règles, donnant aux gens la possibilité de prêter l’allégeance à l’intérêt commun.

Plus généralement, les discussions sur la possibilité de transformer le pays en une république complète remontent à un certain temps, avec John key, Jim Bolger et Helen Clark tous affirmant que cette vision était très claire.

Dans son discours d’adieu au parlement, Clark avait déclaré : “Il est inévitable que notre statut constitutionnel en tant que monarchie change également. Il s’agit non pas de savoir si, mais quand”.

La question séculaire a de nouveau été soulevée durant les débats de dirigeants électoraux cette année, avec Jacinda Ardern et Judith Collins déclarant que la Nouvelle-Zélande deviendrait “éventuellement” une république, mais ce n’était pas non plus à l’ordre du jour politique.

Mais cette discussion de la monarchie contre la république passe à côté de la conversation plus large sur la constitution néo-zélandaise et des appels constants à une transformation qui consacre les valeurs et la conception de Te Tiriti o Waitangi et répond à la nécessité d’inclure les droits autochtones.

“Il y a une conversation beaucoup plus nuancée qui doit être tenue autour de la transformation constitutionnelle qui se perd dans ce genre de réaction brutale de la part des personnes qui soutiennent principalement la monarchie”.

Menéndez March dit que la réaction générale à son tweet est basée sur l’hypothèse qu’il est républicain.

“Il y a une conversation beaucoup plus nuancée qui doit être tenue autour de la transformation constitutionnelle qui se perd dans ce genre de réaction brutale de la part des personnes qui soutiennent principalement la monarchie”.

“Les conversations ont porté sur la question de savoir comment positionner les droits autochtones au sein d’une république”, a-t-il déclaré.

Le député vert prenait l’exemple de son pays d’origine, le Mexique, où le mouvement d’indépendance loin de la couronne espagnole n’a pas garanti la souveraineté des peuples autochtones et a fini par enraciner des injustices historiques.

Il ne sert à rien de changer la constitution si elle ne remédie pas aux injustices historiques, ajoute Menéndez March. Tout mouvement indépendantiste devait garantir la souveraineté des peuples autochtones, et dans le cas de la Nouvelle-Zélande, honorer la souveraineté maorie.

Encore une fois, ce n’est pas une nouvelle conversation; c’est une question qui remonte à 1840 et qui a toujours été un sujet de débat pour les Moaris.

“Faire en sorte que Te Tiriti o Waitangi soit respecté est l’une des raisons fondamentales pour lesquelles je suis députée”.

Ces dernières années, cette discussion dépassa les espaces maoris- et des appels à une transformation constitutionnelle ont été soulevés de différentes manières et dans différents contextes.

En 2018, Menéndez March a rejoint un groupe de Maoris et de Migrants dont la Ministre du Développement maoris Nanaia Mahuta, pour demander que le traité de Waitangi soit inclus dans les cérémonies de citoyenneté.

Une pétition adressée au Ministre de l’Intérieur a proposé le libellé suivant : “Je juge que je serai fidèle et que je porterai une véritable allégeance à Tangata Whenua et à la Couronne, conformément à la loi que j’honorerai Te Tiriti o Waitangi et respecterai fidèlement les lois de la Nouvelle-Zélande et remplirai mes devoirs en tant que citoyen néo-zélandais.”

Il était similaire à un projet de loi antérieur parrainé par l’ancienne députée vert Catherine Delahunty, en 2012.

Un an plus tôt, le chef du Parti Mana, Hone Harawira, fut expulsé de la Chambre pour avoir refusé de prêter allégeance à la reine. Il a lu le serment à Te Reo, mais a prêté allégeance à Te Tiriti plutôt qu’à la reine.

En 2014, l’ancienne codirigeante du Parti maori, Marama Fox (alors députée de liste), a de nouveau soulevé la question.

A l’époque, elle dit à Stuff qu’elle était “consternée” de ne pas avoir été autorisé à honorer Te Tiriti en tant que document fondateur du pays et “qui nous rends uniques en tant que nation”.

“Faire en sorte que Te Tiriti o Waitangi soit respecté est l’une des raisons fondamentales pour lesquelles je suis députée”.

Plutôt que de refuser de lire le serment –ou l’affirmation non religieuse- Fox a dit qu’elle veillerait à ce que son premier projet de loi d’initiative parlementaire modifiera le serment. Mais en 2016, son projet de loi a été rejeté en première lecture.

Ricardo Menéndez March (quatrième à partir de la droite) a déclaré que son tweet et le message sous-jacent étaient conformes à la politique bien établie du Parti vert.

Photo : fournie

Avant les élections de cette année, le Parti maori a recentré la conversation en publiant sa politique Mana Motuhake, axée sur une nouvelle dédicace à Te Tiriti o Waitangi.

“De toute évidence, et c’est important à noter, ce pacte a été violé depuis le jour où il fut signé et continue de l’être 180 ans plus tard”, a déclaré le parti.

Il propose une série d’actions dans lesquelles les Maoris peuvent affirmer leur droit à l’autogestion, à l’auto-détermination et à l’auto-gouvernance dans tous les domaines.

Cela comprend la création d’un Parlement Maori et la mise en œuvre des recommandations de Matike Mai Aoteoroa pour la transformation constitutionnelle.

Matike Mai est un rapport décisif qui trace le chemin vers la réalisation de la transformation constitutionnelle, dans le but de consacrer les valeurs et les objectifs de He Whakaputanga o te Rangatiratanga o Nu Tireni (la déclaration d’indépendance) et Te Tiriti o Waitangi.

Le rapport ne traite pas comment modifier la constitution existante pour adapter Te Tiriti au système de Westminster, mais comment transformer la constitution du pays d’une manière conforme aux principes de Te Tiriti.

La création du groupe de travail indépendant fut un long périple, mais entre 2012 et 2015, le groupe a tenu 252 hui pour établir ce que les Maoris considéraient comme les valeurs de Te Tiriti et comment celles-ci deviendraient partie intégrante d’une nouvelle constitution.

“Depuis 1840, les maoris tentent d’assurer une relation constitutionnelle respectueuse et égale avec la Couronne, comme promis dans Te Tiriti o Waitangi”.

En 2016, le rapport a été publié, accompagné d’une série de recommandations et de six modèles indicatifs de gouvernance.

Ceux-ci comprenaient un modèle à trois sphères, avec une assemblée iwi/hapu (sphère rangitaranga), la Couronne au Parlement (sphère Kawanatanga) et un organe délibérant conjoint (sphère relationnelle).

Matike Mai reconnait également les difficultés de conception et de mise en œuvre de changements de cette ampleur.

“Nous soulignons cependant qu’il ne s’agit pas d’un nouveau dialogue car le principe de la transformation constitutionnelle fait partie du débat politique maori depuis plus de 170 ans…

“Depuis 1840, les maoris tentent d’assurer une relation constitutionnelle respectueuse et égale avec la Couronne, comme promis dans Te Tiriti o Waitangi. Cela ne s’est évidemment pas produit comme le montre très clairement l’histoire et les conséquences de la colonisation.

“Pourtant, les Maoris n’ont jamais abandonné la promesse du traité”.

Matike Mai a également déclaré que le manque de progrès dans la réalisation d’objectifs spécifiques centrés sur les Maoris sur des questions clés n’était pas uniquement dû au désintérêt de la Couronne.

“On a plutôt estimé qu’il existait un déséquilibre plus fondamental entre l’exercice du pouvoir constitutionnel par la Couronne et l’impuissance constitutionnelle des Maoris”.

Ceux qui ont participé à la hui ont parlé de reprendre le pouvoir sur leur propre territoire.

D’aucuns ont dit qu’ils comprenaient que les Maoris devraient être à la table des conseils locaux ou du Parlement, car c’est là où elle se trouve actuellement, “mais cela ne veut pas dire que là où elle devrait toujours être ni même où elle est censée être”.

“Je veux que mes enfants sachent que nous pouvons changer cela et réinitialiser la table parce que c’est la bonne chose à faire”.

Le calendrier des conversations préliminaires a été établi sur cinq ans, et une Convention Constitutionnelle maorie devrait être organisée l’année qui suit.

Matike May dit que le pays devrait viser à réaliser la transformation d’ici 2040.

La mise en œuvre de Matike Mai, y compris le travail en vue d’une transformation constitutionnelle d’ici 2040, est également une politique fondamentale du Parti Vert.

La politique de Parti maori et le rapport Matike Mai ont tous reçu un certain intérêt au moment de leur publication, mais n’ont pas suscité beaucoup d’attention lors de cette élection.

Alors que les questions touchant de manière disproportionnée les Maoris, notamment l’éducation, la justice et le logement, ont toutes été soulevées pendant la campagne électorale, il y a eu peu de discussion sur les changements constitutionnels qui pourraient aider à résoudre ces problèmes par l’autodétermination et la souveraineté.

Menéndez March a déclaré que c’étaient les problèmes auxquels il pensait lorsqu’il a tweeté le mème chihuahua.

Ils n’étaient pas nouveaux, et à son avis, ils n’étaient pas controversés, en particulier pour un membre d’un parti dont la politique exprime clairement son soutien à ce type de transformation.

“La Couronne elle-même profite du maintien de ces structures telles quelles sont. Les gens au pouvoir qui ont bénéficié de la colonisation, profitent du fait que les choses restent les mêmes”.

Jusqu’à présent, il n’avait pas eu la volonté politique de faire ces changements, mais Menéndez March a déclaré qu’il pensait que c’était le bon moment.

“La Couronne elle-même profite du maintien de ces structures telles quelles sont. Les gens au pouvoir qui ont bénéficié de la colonisation, profitent du fait que les choses restent les mêmes”.

“En changeant quelque chose d’aussi simple que le serment, à certains égards, nous affirmons l’histoire réelle d’Aotearoa et cela menace les structures de pouvoir qui sont en place depuis des générations”.

L’une des personnes citées dans le rapport Matike Mai explique à quel point la réinvention de la constitution du pays sera difficile :

“Ca va être difficile parce que beaucoup de gens n’aimeraient pas ce genre de débat mais je pense que c’est seulement à propos de notre rangatiratanga…cela vaut la peine d’en parler, même si cela semble impossible à obtenir maintenant…je continuerai”.

Mais Menéndez March a déclaré que si un tweet pouvait démarrer cette conversation, alors il est prêt pour ça.

“Un mème peut déclencher une conversation nationale sur la transformation constitutionnelle. Et je pense qu’il y a du pouvoir là-dedans”.

“Je ne m’excuserai certainement pas du fait qu’un mème soit un moyen utile d’articuler la politique parfois”.

Lorsque le Parlement reprendrait le mois prochain, Menéndez March prêterait serment à la reine, car c’était actuellement la seule option. Mais cela ne serait pas confortable.

“Je comprends les tensions qui accompagnent le soutien des mouvements autochtones basiques, tout en étant un représentant de la Couronne”.

Et bien qu’il ne pardonne pas les attaques vitriols qu’il a reçu en réponse à son tweet, le nouveau député dit qu’il comprenait qu’il y aurait toujours des réactions négatives en cas de ‘bouleversement du statu quo’.

“Je pense que nous devrions laisser un espace pour ‘ceux qui ressentent un malaise quand un changement leur est proposé’” a-t-il déclaré.

Source: newsroom

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